L’idée d’un revenu universel

                               

Conjoncture et décisions                         Bernard Biedermann                          https://theoreco.com  

 L’idée d’un revenu universel     mai 2020         

Mots clés : revenu universel, revenu de base, allocation universelle, RSA , prime pour l’emploi, pauvreté, pouvoir d’achat, https://entrepreneurs-pour-la-france.org                                       

 

L’idée d’un revenu universel en France

 

Dans un contexte de récession économique due au confinement et de nouvelles réflexions sociétales, l’idée d’un revenu universel (revenu de base, allocation universelle) va reprendre de l’importance dans le discours politique dans beaucoup de partis politiques. A l’origine, l’idée a été inventée par Thomas More au début du seizième siècle. Plus tard le philosophe John Locke proposait d’indemniser ceux qui ne pouvaient vivre de l’agriculture, de la chasse, de la pèche. Puis d’autres mouvements et économistes libéraux comme Milton Friedman ont adhéré au concept.

De nos jours Wikipédia propose comme définition « Le revenu de base, encore appelé revenu universel ou allocation universelle, est une somme d’argent versée par une communauté politique à tous ses membres, sur une base individuelle, sans conditions de ressources ni obligation ou absence de travail. L’âge est parfois un critère discriminatif. »

Concrètement, tout Français majeur toucherait tous les mois par exemple 800 euros ; ce montant serait bien entendu soumis à l’impôt sur le revenu et à des suppressions de différentes aides sociales, comme le RSA, la prime pour l’emploi, les bourses d’études, etc.

Les objectifs du revenu universel sont les suivants : supprimer la pauvreté durable ou passagère, aider les étudiants et les créateurs d’entreprise en phase de start-up, et aussi réduire le nombre de procédures administratives (de l’Etat, des régions, des communes, des associations, etc.) dont l’interfonctionnement n’est vraiment pas simple et devrait faire l’objet de réformes.

Politiquement cette proposition est plutôt séduisante, mais peut-on pour autant lui attribuer des avantages lorsqu’on la construit dans la réalité économique ?

Un des défauts du revenu universel, c’est justement son côté universel qui ne tient pas compte des très grandes disparités du pouvoir d’achat. A Paris, avec 800 euros on ne peut pas se loger, se nourrir, se soigner et s’habiller, alors que dans certaines régions campagnardes de la ‘’France Profonde’’ la situation est presque satisfaisante. Ce que l’on constate en France concerne pratiquement tous les pays développés avec cependant quelques nuances ; les pays nordiques sont mieux organisés pour traiter la grande pauvreté et dans certains pays du sud comme l’Italie, la solidarité familiale joue toujours son rôle.

La France compte quatre millions de personnes mal logées et 250.000 sans domicile fixe pour lesquelles la réinsertion ne tient pas uniquement d’un versement d’un revenu universel. La situation des SDF relève de bien d’autres facteurs : santé, hygiène, relationnel de rupture familiale, professionnel, psychologique, juridique, etc. qui nécessite de l’aide personnalisée et des prestations de professionnel que l’Etat ne gère pas vraiment et qui comporte bien des différences entre Lille et Mayotte.

Dans un autre domaine, évidemment moins dramatique, celui des jeunes créateurs de start-up, le revenu universel ressemble à celui de John Locke. L’esprit dans lequel on travaille dans une start-up est sous la pression de la contrainte du temps, de l’imagination, de la détermination, du risque, avec des revenus qui n’arrivent pas tout de suite. Certaines écoles ont lancé des départements qui aident les jeunes aventuriers. Cette idée pourrait être généralisée dans le cadre de formations et d’apprentissage de métiers dont l’offre ne correspond pas à la demande du marché avec, pourquoi pas, un système où une aide supplémentaire est remboursable sur une très grande durée, un peu comme pour les polytechniciens.

La Finlande a effectué des tests de revenu universel (de 560 €) pour 2.000 chômeurs. Ces revenus supplémentaires ont bien entendu été appréciés par les concernés, mais il n’y a pas eu d’impact positif sur leur possibilité d’emploi. En toute rigueur ce test n’avait pas de vocation macroéconomique, objectif lui aussi bien compliqué. 

Pour donner une idée de l’importance des aspects économiques globaux liés au revenu universel, voici quelques hypothèses chiffrées :
Population française de plus de 18 ans :  57.400.000
Montant global du revenu universel : 800 € *12*57.400.000 = 551.040.000.000 €. Hypothèse du nombre de Français qui toucheraient la totalité du revenu universel sans contribution fiscale : 6.000.000 (en toute rigueur il faudrait aussi tenir compte de ceux qui ne toucheraient qu’un pourcentage du revenu universel en raison de leur revenu régulier)
Montant correspondant à cette tranche de population : 800*12*6.000.000 = 57.000.000.000€
De ce montant il convient de déduire le RSA, la prime pour l’emploi et les bourses d’études, soit environ  13.000.000.000 € ; le montant est alors de  44.000.000.000€
Ce montant correspond à  1,8 % du PIB
Ce montant correspond à  11,25 % du budget de l’Etat  (391.000.000.000 €)
Et surtout, ce montant correspond à  60 % du déficit du budget de l’Etat en 2019.
Ces quelques chiffres ne donnent évidemment qu’une idée approximative des montants engagés et ne tiennent pas compte des coûts administratifs.
Il faudrait également tenir compte des perspectives de l’économie française à partir de 2020 et particulièrement de la situation du budget, de la dette, du poids de l’Etat qui est le plus important de tous les pays de l’OCDE avec 57 % par rapport au PIB.
Pour résumer, quand on rentre dans le concret, on se rend vite compte que le revenu universel inconditionnel, sans améliorer la situation de l’emploi, serait soit injuste, soit perdrait l’essentiel de ses avantages théoriques.

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                                                                                                             Bernard Biedermann

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