Conjoncture et décisions Bernard Biedermann https://theoreco.com
Fondements d’une politique du logement, soyons réalistes octobre 2017
Mots clés : Politique du logement, rentabilité immobilier, HLM, taxes, ISF,ALUR
Fondements d’une politique du logement, soyons réalistes
Voir aussi : https://www.contrepoints.org/2017/09/29/299804-logement-nattire-t-plus-investisseurs?
A l’occasion de l’élaboration d’une nouvelle politique du logement, il serait utile de rappeler les réalités économiques sur lesquelles elle devrait se fonder. Parmi les nombreux facteurs susceptibles d’influencer l’avenir du logement, le taux de rentabilité de l’immobilier et les spécificités géographiques s’avèrent être les deux réalités primordiales qui devraient guidées les futures dispositions.
Le taux de rentabilité est le rapport entre, – au numérateur, la somme des loyers annuels, diminués des charges, des rénovations, des mises au normes, des frais de syndic,des frais financiers, des assurances, des taxes foncières, de la CSG et, personnalisés l’impôt sur le revenu et l’ISF- au dénominateur, le prix d’achat du bien en cas de transaction récente ou, sa valeur résultant de la surface multipliée par l’estimation du prix du mètre carré. Le taux de rentabilité a l’avantage d’être synthétique. En France, ce taux varie entre 2 % et 8 % selon la localisation du bien.
Mais, il convient de bien distinguer le taux de rentabilité constaté à un moment donné du taux de rentabilité anticipé par l’ investisseur potentiel avant sa décision qui fait une estimation avec une composante plus ou moins subjective des revenus nets futurs de son investissement. Il va également introduire une variable de risque liée au comportement des futurs locataires, plus ou moins accentuée par les clauses du bail et au temps nécessaire pour retrouver un autre locataire ainsi qu’une prévision du niveau de la plus value nette en cas d’une revente.
Si l’on fait abstraction du fait que les prévisions économiques sont un art difficile surtout lorsqu’elles concernent l’avenir, l’approche par le taux de rendement est relativement simple. Malheureusement, les choses se compliquent lorsque l’on tient compte de la localisation géographique des biens immobiliers. Les agents immobiliers aiment préciser que ce qui compte, c’est « la localisation, la localisation, la localisation » , qu’il faut comprendre en terme de région, ville, quartier, rue,parking, étage, côté cour ou côté rue, et , ou pas, vue sur la mer !
Economiquement, les choses sont encore plus compliquées car il y a bien deux marchés interagissant l’un sur l’autre : le marché locatif et le marché des biens immobiliers destinés ou non à la location. Ces deux marchés fonctionnent bien entendu avec une offre et une demande mais ne fluctuent pas toujours dans le même sens. Ainsi, on peut rencontrer quatre cas de figure :
- prix des loyers et prix du mètre carré augmentent tous les deux dans le même sens (l’inflation d’autrefois)
- prix des loyers et prix du mètre carré diminuent dans le même sens (c’est la situation dans certaines petites villes de province peu dynamiques économiquement)
- prix des loyers qui augmentent ou sont stables alors que le prix de l’immobilier est en baisse (c’est le cas dans certaines villes de province avec des taux de rentabilité de 8 % dans lesquelles les investisseurs anticipent des baisses de la demande sur le marché des biens alors qu’il y a une rigidité à la baisse des loyers, en partie due aux indices INSEE)
- prix des loyers à la baisse, suite à intervention politique, alors que le coût de l’immobilier augmente ce qui se traduit par une baisse de la rentabilité avant la baisse de l’offre.
Ces cas de figure sont bien sûr liés à la localisation. D’autres facteurs doivent également être pris en compte comme, la part du logement social, les transports en commun, le dynamisme de la région en terme d’implantations ou de disparitions d’entreprises, un marché de l’emploi instable, la démographie …
Si l’on devait établir une politique du logement en se fondant sur ces quelques éléments d’analyse on devrait d’abord se méfier de tout dispositif global établi par des Parisiens qui ne connaissent ni la banlieue, ni la province ! L’idéal consiste en une décentralisation souple qui tienne compte des réalités locales, ce qui n’a pas été le cas ces dernières décennies, aussi bien sur le marché privé que sur le marché du logement social. Il y a dans plusieurs villes des offres excédentaires d’appartements HLM qui restent vident. C’est le cas également sur le marché privé ou des promoteurs immobiliers ont réussi à vendre à des investisseurs d’autres régions, des appartements qui plusieurs années après leur mise sur le marché sont toujours inoccupés. En matière d’investissements immobiliers, le risque zéro n’existe pas. Parallèlement, dans d’autres villes beaucoup de ménages ont un mal fou à trouver un appartement correct en terme de surface et de niveau de loyer par rapport à leur revenu.
La situation économique en France n’est pas bonne. Les jeunes ménages planifient beaucoup moins l’achat d’un logement par rapport au passé, ce qui se traduit relativement par une part du marché locatif en croissance. La question est alors de savoir qui doit répondre à cette demande : l’état ou les investisseurs particuliers ? Dans ce dernier cas la politique du logement doit tenir compte des conditions de rentabilité qui font redémarrer l’investissement immobilier créateur d’emploi, de manière durable.
La décentralisation des décisions, une meilleure gestion du logement social, le sens des réalités en matière de décisions économique, une meilleure orientation de l’épargne vers l’investissement productif, la diminution des normes, plus de souplesse dans les contrats de bail, et le rejet de postures idéologiques s’imposent.
Bernard Biedermann