Homo Economicus Calcul, temps et choses

                         

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L’intention de cet article est de  proposer  une révision de la définition de  l’homo  économicus  vers  une optique plus large et plus proche des réalités.

Le concept d’homo économicus  est né  à l’époque de Walras. En deux mots,  il  signifie que l’agent économique peut être réduit à une fonction de maximisation de satisfaction ; de ce fait il constitue l’un des fondements de  la théorie de l’équilibre économique. La théorie néoclassique  a conservé  l’hypothèse de rationalité bien que n’ayant  cessé de faire l’objet de critiques de la part  de  Marxistes, des Keynésiens et de penseurs issus d’autres domaines comme la psychologie,  la sociologie ou la biologie. Influencées par ceux-ci, les mouvements politiques altermondialistes et écologistes relaient au quotidien la remise en cause de l’homo-économicus  en affirmant  les effets négatifs de la consommation sur l’environnement et son absence l’épanouissement culturel.     

Il ne s’agit pas ici,  de revenir sur ces critiques en  pondérant la part de vrai ou d’idéologique que comprend l’hypothèse de rationalité mais de  partir d’un double constat. D’abord qu’elle ne peut être  complètement fausse et  qu’ensuite elle mérite d’être revue.

                                                      

 Notre proposition  consiste  à dire que le concept d’homo-economicus  couvre  l’ensemble des faits et phénomènes qui précèdent la décision de transaction. Le concept résulte de la complémentarité  de trois notions  -le calcul cérébral – le  temps – la nature des choses.

 

La notion de complémentarité doit être prise  dans son acception la plus forte. Comme en physique quantique, d’une particule observée  on    peut mesurer ses coordonnées ou sa vitesse mais pas les deux à la fois.

Pour définir ce qui se passe chez l’homo économicus  il faut l’envisager sous un triple éclairage ;  une   nouvelle approche   résultant de l’intersection de trois notions, nécessairement complémentaires, le calcul, le temps et les choses.   

Voyons  comment ce faisceau,  calcul cérébral + temps économique + nature des choses   permet  de mieux comprendre l’homo économicus, en précisant l’éclairage de chacun.          

 

                                                                         Le calcul cérébral

 

La science économique actuelle et « officielle » est fondée sur l’hypothèse d’un homo économicus  rationnel. En fonction de l’utilité que lui procurent les biens offerts sur le marché il  en détermine la quantité   achetée ;  il compare ses revenus  à la désutilité générée par son travail. Il peut répartir ses transactions dans le temps en tenant compte du fait  qu’une valeur actuelle vaut plus qu’une valeur future.    

L’hypothèse de l’homo economicus rationnelle s’accompagne de développements  visant à couvrir le plus grand nombre de cas de figure. Malheureusement l’outil mathématique et l’introduction de nouvelles hypothèses telle que l’imperfection de l’information ne permettent pas toujours  de formaliser  toutes les situations surtout lorsque le nombre de biens augmentent et que la complexité de leur caractéristiques  s’accroit. Les recherches des dernières décennies  en matière de  micro-économie s’orientent  alors vers de nouvelles approches comme  la théorie des jeux. Pour autant, l’état de l’art de l’agent économique n’est pas  une affaire  close. Les choses se compliquent lorsque le consommateur /travailleur agit  de manière spontanée, lorsqu’il suit des phénomènes de mode, lorsqu’il s’achète un bien dans le but de  faire plaisir à sa belle mère, c’est à dire lorsque son comportement est à la limite de la « normalité » définie  par la psychologie; bref lorsqu’il ne calcul plus et qu’il devient  (sic)  irrationnel. On assiste alors à des récupérations interdisciplinaires : l’économie voulant intégrer une composante de psychologie et  la sociologie voulant englober l’économie… Mais les économistes restent confiants ; d’ailleurs, certaines écoles de pensée puristes  n’abandonnent pas l’hypothèse classique de rationalité  car, tout compte fait, on peut toujours trouver une justification utilitaire  chez le masochiste, le schizophrène ou  chez celui qui décide d’acheter une voiture sur un coup de tête parce que quelque chose ou quelqu’un  l’a rendu euphorique peu de temps avant la transaction. Le normal, l’anormal, les sentiments, les émotions, le désir de paraître et bien d’autres facettes de la nature humaine viennent donc perturber le calcul d’optimisation froid méthodique et  efficace de l’agent rationnel.

Il convient aussi   de souligner que l’insistance de certains à pointer   l’inadéquation de la théorie « officielle »  est bien  souvent motivée par le désir  d’en saper ses fondements dans un but idéologique. Quels  que  soient ces débats, il y a  fort à parier qu’il n’y aura ni gagnant ni perdant.

Dans le cadre de ce qui est suggéré dans cet article, nous préférons botter  en touche ces aspects théoriques  dans ce qu’ils ont d’extrême  par leurs intentions d’exhaustivité. Nous ne posons pas la question de savoir quel est le pourcentage d’agents économiques rationnels ni de comptabiliser le nombre de fois qu’ils ont eu, dans leur vie, un comportement  conforme aux calculs d’optimisation car l’intérêt et le calcul existent, nous les rencontrons tous les jours. 

L’agent économique qui calcule avant de prendre sa décision est-il philosophiquement  libre ? Certes notre  consommateur choisit entre la pomme ou la poire lorsqu’elles ne  lui procurent pas  le même niveau d’utilité mais par définition, le calcul d’optimum  aboutit  à une solution  au sens mathématique du terme qui  ne fait pas appel au libre arbitre. Plutôt que de parler d’un  agent  économique rationnel, nous  préférons donc  partir de l’hypothèse d’un comportement dont  le calcul est le moteur, la notion d’homo économicus devant  alors être complété par l’éclairage        d’autres notions.     

                                                                              Le temps

 

Lorsque la décision que doit prendre  l’agent économique est importante ou qu’elle engage le décideur  pour une longue durée apparaît alors  le paradoxe  suivant : l’homo economicus  a dans le même temps  conscience du caractère irréversible du temps qui passe et de son libre arbitre que lui confèrent  les  possibilités d’organiser la valeur des choses dans le temps pour répondre à des besoins sans cesse renouvelés mais aussi modifiés.

 

Le temps irréversible (voir  l’article Le temps en économie )  est ressenti par l’entrepreneur  aux prises avec les changements, des goûts, du capital, de l’état de l’art  des technologies et du fonctionnement des marchés,  surtout lorsque surgissent des  ruptures et bifurcations inattendues.

 Quand il éprouve le besoin d’épargner pour assurer ses revenus futurs il se situe dans un environnement qu’il essaie de comprendre et  d’anticiper. 

La volonté de maitriser  l’avenir se traduit  à la fois par le besoin de sortir du déterminisme « perçu » de l’environnement et par la  construction d’un processus de réflexion, d’imagination et de recherche d’information tous azimuts dont  le seul but est  de prendre LA BONNE  décision AU BON  MOMENT.

 L’agent économique est, de son point de vue,  conscient de cette phase qui précède sa décision ; le recul sur lui-même, son esprit critique, la méthode adoptée, la prise en compte de l’incertitude  lui donnent l’impression d’un  certain degré de liberté. Dans cette approche, par rapport à  son point de vue, l’homme est  libre : sa décision ne résulte ni d’un calcul mathématique froid,  ni d’un environnement sociologique qui lui dicte ce qu’il doit faire.

 

Quelle que soit l’approche que l’on puisse  avoir concernant le  degré de liberté de l’agent économique, force est de reconnaître  que le ressenti du décideur ne rejoint pas  la notion de temps utilisée dans le calcul économique  enseigné par  la microéconomie. Certes, les calculs d’actualisation   tiennent compte   des probabilités mais l’incertitude, les comportements  dits « économiquement »  irrationnels  et d’autres phénomènes tels que la rationalité procédurale, les  anticipations, le mimétisme ou les prophéties auto-réalisatrices qui relèvent  des comportements décrits  pas la psychosociologie en situation complexes d’incertitudes face à l’avenir ne peuvent faire parti intégrante du calcul mathématique pur. Il ne s’agit pas ici de réfuter le calcul  de la microéconomie mais de suggérer sa complémentarité avec une approche d’une autre dimension. Il ne s’agit pas non plus de vouloir synthétiser ou pondérer  les approches économiques et  psychosociologiques mais de proposer une complémentarité de méthode focalisée vers  l’homo-economicus dont les  processus de décisions appartenant, nous dit on, à des régions du cerveau différentes,  fonctionnent en convergence vers des objectifs communs. L’homme qui décide est à la fois  calculateur et intuitif et c’est bien une notion de temps vécue qui fonde   le  caractère  des esprits animaux chers à Keynes. L’euphorie et  le pessimisme sont habituellement associés aux importantes décisions d’investissement des chefs d’entreprise.  Aujourd’hui,  dans  nos  démographies vieillissantes le consommateur se projette plus que jamais dans le futur. Le temps de l’homo économicus du moyen – âge est bien révolu. Avec une espérance de vie très courte,  des croyances religieuses forte,  et   pour beaucoup l’ignorance de leur âge la notion de temps n’avait pas  à l’époque le poids qu’elle a de nos jours.    

                                                                       La nature des choses   

Le troisième faisceau est celui de la nature des choses. Nous proposons de définir  la nature des choses par l’ensemble des  attributs qui  permettent de différencier  entre eux les biens économiques. C’est un ensemble vaste car il comprend  des  attributs appartenant à des domaines variés.

La littérature économique propose habituellement  plusieurs types  de biens et services liés au niveau d’analyse ou répondant à des besoins plus opérationnels :    

biens complémentaires, substituables,….

biens et services de consommation, d’investissements, liquidités,

produits classés selon leur secteur de production, agriculture, industries, services…

Tenir compte de la nature des choses consiste à enrichir cette approche,       mettre en avant une nouvelle définition  et  déceler en quoi leur nature ne peut être ignorée par l’analyse économique :

       –  relations avec les besoins : primaires, secondaires, consommation, investissement, type de marché,   

       – caractéristiques intrinsèques : élasticité, substituabilité, intensité capitalistique, complémentarité, degré de concurrence, performances,  image  auprès du  consommateur, fétichisme, qualité perçue, produit de rente,

       – fonction dans la société et l’environnement : monnaie, information,

       – degré de complexité.

 

En raison de la répétitivité quotidienne de l’information économique on pourrait penser que le fait de préciser explicitement l’intégration de la nature des choses dans l’analyse économique n’apporte rien, alors qu’à  la lecture d’un article traitant de la conjoncture de tel ou tel secteur,  on  a  bien à  l’esprit, consciemment ou non, les caractéristiques des produits en question. Implicitement dans  un article sur le pétrole ou sur la drogue    le caractère indispensable de ces produits est bien présent. S’il s’agit du commerce de détail des vêtements on n’oublie pas bien   le rôle d’influence de la météo.  Plus  généralement, les articles de conjoncture  complètent  des  résultats globaux, macro-économiques, par des analyses plus fines qui signalent    les  secteurs  d’activités ayant eu directement ou non, un impact sur le niveau global. Les fluctuations de court et de  long terme, ne sont pas les mêmes selon le type de produits. Au niveau des ateliers, des machines dédiées à  la production des mêmes  produits mais qui comportent quelques différences fonctionnelles  apportent un gain de productivité :  « La disponibilité d’un nombre croissant de machines différentes entraine une augmentation de la productivité. Ce caractère de plus en plus composite des équipements peut aussi s’interpréter en termes de « sophistication » accrue des équipements, qui intègrent chacun un nombre croissant d’innovations sous-jacentes. »

( D Guellec,  P Ralle , les nouvelles théories de la croissance). 

 

Dans le domaine de la recherche économique, la part des articles qui traitent d’un produit spécifique  et de son marché est en considérable  augmentation par rapport aux documents de recherche  d’ordre général.

Tenir compte de la  nature  des choses, c’est aussi  mesurer  la complémentarité et l’interdépendance entre les biens et services. Au-delà de la complémentarité « physique » (le véhicule et le carburant), culturelle (le couteau et la fourchette), l’existence des  choses est liée à l’organisation du système économique et au mode de vie. Marx nous expliquait que le besoin de notaire est cohérent avec le statut juridique de la propriété. Le marché des transports, celui de la restauration, dépendent  de l’organisation géographique et du prix de l’immobilier. Il  faut donc  se poser la question de la raison de l’existence des choses eu égard à leur fonction et non pas uniquement   le « comment » ou le « combien » auquel répond l’analyse en terme de besoins, d’offres et demandes.

 La fonction des choses dans la société  devrait  avoir autant d’importance qu’on en accorde   habituellement à celle de la monnaie ou de l’information.    La notion de fonction va plus loin que celle de besoin qui elle non plus ne se pose pas  la question de son origine. L’automobile  répond au besoin de déplacement : elle est  un outil de travail et un bien de loisirs  lié   à l’organisation, au mode de vie, et  à  toutes ces choses que l’on qualifie d’idéologiques et culturelles. Raisonner en termes de fonctions améliore notre compréhension du fonctionnement et de  l’évolution économique.

La notion de fonction doit par ailleurs  être associée à celle de détournement :  les places des villes du Moyen Age , réservées à la fête de Saint Guy , aujourd’hui   places de parking payant,  la cuillère  à soupe utilisée comme chausse pied, certains terminaux conçus pour être reliés  aux gros systèmes informatique  s’avérant  être des petits systèmes autonomes performants … Plus récemment on a pu prendre connaissance de la nouvelle monnaie bolivienne, la coke ! Il y a là aussi détournement. La drogue garde sa valeur, elle est acceptée par tous ( les habitants des régions  productrices), elle est étalon de valeur ( les commerçants signalent les prix des aliments et des objets  en grammes de coke ), elle  peut est thésaurisée , elle facilite les  échanges et sa production est, sinon  « contrôlée »  en tout cas  limitée. C’est lorsque la nature d’une chose  change qu’on éprouve le besoin de la préciser.

Un entrepreneur, en phase de décision d’investissement essaie d’évaluer la valeur des probabilités relatives aux revenus futurs mais  en cas d’incertitude,  il  a naturellement tendance à vouloir la cristalliser  dans le produit lui-même. Sur ce point, les slides  de présentation sont révélateurs : on souligne le caractère incertain d’un   marché, d’une offre ou d’une  stratégie alors que l’incertitude est par définition un sentiment. L’incertitude se renforce « lorsqu’il est question de changement structurel, d’innovation et c’est par définition la nouveauté qui émerge : quelque chose qui n’existait pas auparavant ….Les choix relèvent  alors plus de l’exercice entrepreneurial  que des anticipations rationnelles… » (D Guellec,  P Ralle, les nouvelles théories de la croissance)  

 

Le niveau de complexité de  fabrication  des caractéristiques des biens  et  services doit également faire parti de l’analyse économique. Ainsi on comprend mieux pourquoi le marché est devenu le moyen le plus efficace et  que la planification est devenue complètement dépassée ; au début du siècle dernier on pouvait concevoir  la  planification de la  pomme  de terre ou de l’acier mais la plupart des  produits d’aujourd’hui ne pourraient être  offert   sans les mécanismes du marché.

Et puis il y a les grandes époques, la machine à vapeur,  le chemin de fer, l’électricité, l’automobile, l’ordinateur, et bientôt les nano et les biotechnologies. Chacun  de ces  cycles  s’est caractérisé  par son propre mode de production, son  type de consommation et surtout son d’organisation sociale et géographique. « On peut même penser que l’organisation de la société joue un rôle important et que le terme « progrès technico-sociétal » serait plus pertinent que celui de progrès technique. »   (D Guellec,  P Ralle , les nouvelles théories de la croissance)     

                                                                                  Applications                                                   

 

L’approche complémentaire devrait nous permettre de  découvrir  sous un  autre éclairage des  thèmes comme celui de la valeur ou de la croissance …

 

Concernant la valeur économique  l’approche complémentaire apporte une vision temporelle préalable à la transaction. A titre d’exemple,  la valeur d’une automobile dans le temps évolue selon  sa  fonction, elle est d’abord le véhicule neuf dernier cri, puis l’objet d’une cotation  sur le marché de l’occasion puis inputs d’une société de récupération ou, revalorisée en tant qu’antiquité dans un salon d’exposition. Nous vivons aujourd’hui  la révolution du numérique et son lot de produits intrinsèquement  immatériels pour lesquels,  « le travail mesure de plus en plus difficilement la valeur, du fait de son contenu fortement immatériel, non chronométrable » (Bernard Maris, Anti manuel d’économie).    

 

Dans « La grande désillusion », Joseph Stiglitz explique les raisons des échecs des politiques économiques recommandées par le FMI auprès des pays en voie de développement. L’analyse porte sur plusieurs pays d’Asie, de l’ancienne Union Soviétique et de l’Afrique. L’économiste reconnaît que les quelques pays qui ont connu la croissance sont ceux qui justement  n’ont pas suivi les conseils du FMI. Mais là où il y a eu échec c’est à cause d’une analyse superficielle puis  de mauvaises politiques économiques. Il y a eu bien sûr  des erreurs en matière de politique de change et de taux d’intérêt, mais il y avait eu un manque de réflexion certainement due à  un  profil d’économistes exagérément  formés aux théories néoclassiques dans leurs aspects mécaniques. Nous disons  alors que les choses et le temps ont été oubliés par des gens qui ne fréquentaient que les bureaux feutrés des banques et des ministères.

A propos de la Russie, Stiglitz rappelle que « la privatisation devait être la première étape du processus de restructuration de l’économie. Il fallait changer non seulement la propriété des entreprises   mais aussi leur direction, et il fallait réorienter leur production. Les firmes ne produiraient plus ce qu’on leur dirait de produire, mais ce que voudraient les consommateurs…. ».  Nul besoin d’être économiste pour comprendre qu’une telle entreprise, c’est-à-dire, changer toutes les choses,  ne pouvait se faire en  quelques années. En 2007, certains s’étonne encore de la situation de l’ex RDA  « 17 ans après » !

On ne peut modifier le cours des choses en claquant des doigts, toute évolution économique  ne peut se faire qu’à son propre rythme,  comme dans beaucoup d’autre domaine, biologie, thérapie, environnement.

« En Asie, les mesures du FMI n’ont pas seulement exacerbé la crise, elles l’ont aussi en partie provoquée : la cause principale a probablement été la libéralisation trop rapide des marchés financiers,… il (le FMI) a compris, notamment, combien libéraliser trop vite les marchés des capitaux peut être dangereux. ». Pour d’autres pays, qui n’ont pas suivi le FMI, « le commerce a fini par être libéralisé, mais progressivement, à mesure que les industries d’exportation on créé de nouveaux emplois. Tandis que le consensus de Washington préconisait instamment une libéralisation rapide des marchés des capitaux les pays d’Asie orientale ne l’ont opéré que graduellement…. »

Stiglitz nous donne bien d’autres exemples pour lesquels on n’a pas tenu compte du temps parce que « c’est le problème du calendrier. L’idéologie ignore ces questions. Elle dit uniquement : passez le plus vite possible à l’économie de marché. Mais la théorie  et l’histoire économique montrent assez bien combien il peut être désastreux de brûler les étapes. ».

 Aujourd’hui, les pays riches font face à l’immense problème de l’équilibre     environnemental et de l’effet de serre : Faisons le vœu que les économistes participeront de manière réaliste  à ce défi en évitant les erreurs relatives au temps et aux choses et  en travaillant beaucoup plus sur le « comment faire ». Ainsi il faudra bien  prendre conscience du degré de rigidité de notre système économique qui, n’en déplaise aux écologistes, ressemble plus à une péniche qu’à un dériveur. A-t-on vraiment mesuré tout les produits et services   concernés  directement ou indirectement  par l’automobile  qui seront  impactés par une baisse sensible  de l’activité  des transports : producteurs, garagistes, assurances,…, accidentologie, kinésithérapie, entretien des routes, tourisme,….etc. etc.

                                                                                     -.-

  

Ces quelques réflexions  ont  pour but d’étayer notre proposition d’une définition de l’homo economicus ; pour être complet il y aurait évidemment  bien d’autres  thèmes à développer. Citons par exemple  les préoccupations de Pierre Jacquet  (Le Monde, 9 octobre 2007, Comment produire les biens publics mondiaux ?) ; elles  évoquent nos relations avec les choses, rappellent  la force de l’intérêt, c’est-à-dire le calcul et  se désole d’un comportement qui consiste à laisser filer le temps :              

  « Nos sociétés, attachées à leur mode de vie, privilégient le changement dans la continuité. Chaque individu (mais aussi chaque pays) n’a intérêt à modifier ses comportements que si les autres le font aussi, et chacun attend donc que les autres bougent avec, comme conséquence, l’inaction. Le résultat est que nous devons souvent gérer des crises qui étaient pourtant annoncées. Ce qui est vrai pour la finance internationale s’applique aussi à l’environnement : la rationalité individuelle ne conduit pas à la rationalité collective. ».Pour l’économiste, le besoin est à l’origine de tout ; nous  avons essayé  de nuancer cette  affirmation car  « les besoins sont ce qu’il y a de plus obstinément inconnu entre toutes les inconnues dont s’occupe la science économique ». (Jean Baudrillard,  La société de consommation.)

 

                                                                                                                               Bernard Biedermann

                                                                                                                               Conjoncture et décisions

                                                                                                                                https://www.theoreco.com                                                                                         

                                                                                                                                octobre 2007

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