Relocalisation du marché de l’offre et la demande dans les directions de marketing

         

Conjoncture et décisions                    Bernard Biedermann                           http://www.Theoreco.com 

 Relocalisation du marché de l’offre et la demande dans les décisions de marketing                     Avril 2023

                  

                              

                   Relocalisation du marché de l’offre et la demande dans les directions de marketing

 

                  

 L’objectif de cet article est de proposer une suggestion concernant la relation entre les fondements théoriques de la loi de l’offre et la demande et les comportements des entreprises dans les   conditions actuelles. La principale évolution depuis 50 ans est celle des stratégies des directions de marketing qui gèrent la vie des produits et services de leur première conception jusqu’à l’arrêt de leur commercialisation. 

L’idée consiste à faire le constat que les directions de marketing récupèrent la loi de l’offre et la demande dans le cadre des réflexions précédents les stratégies de produit. Cette récupération se traduit de différentes manières : les décisions sont conformes aux mécanismes de l’offre et la demande ou pas. Dans ce cas les mécanismes de l’offre et la demande qui constituent la justification de la stratégie sont déformés, exagérés, anticipés, ignorés, voire en contradiction avec les conclusions auxquelles aboutiraient la logique du marché considérés.

Ces hypothèses de comportements stratégiques diffèrent selon le type de produit, les secteurs, la taille des entreprises, la culture de management, et bien d’autres variables comme les anticipations dans le temps et les contraintes des autres fonctions de l’entreprise. 

L’hypothèse de maximisation du profit reste d’actualité mais dans une nouvelle version. Il convient par exemple de l’appliquer non pas, au niveau de l’entreprise mais à l’un des produis de sa gamme qui fait l’objet de l’élaboration d’une stratégie cohérente avec sa définition.

La méthode pour bien expliquer ces comportements de stratégie n’est pas simple car on constate une multiplicité de cas de figure avec beaucoup de nuances et d’originalités. Une vision binaire est donc inefficace.             

 

 

                                                      Dans le petit commerce   

Dans certains petits commerces, comme par exemple dans les boutiques de vêtements, il y a un grand délai entre les décisions concernant les futurs produits proposés et leurs dates de vente en boutique. Les commandes ont souvent lieu un an avant la disponibilité en magasin. Elles sont réalisées par des acheteurs qui doivent anticiper les ventes futures en se faisant une opinion sur chaque type de vêtement, en pratiquant une sorte d’empathie pour comprendre leurs clients réguliers. Les choix des modèles se font sur la couleur, la coupe, et bien d’autres caractéristiques, en fonction de la mode anticipée de la future saison. Le stock de quantités offertes en début de saison est alors fixé, et la rencontre avec l’acheteur final est attendue avec impatience. On a bien anticipé ou on s’est trompé ! Selon le cas, on modifie les prix qui d’ailleurs sont différents selon, la ville, le quartier, la saison, … Ainsi on ne peut pas vraiment parler de logique entre l’offre et la demande de l’acheteur qui souhaite maximiser son utilité. Le marché anticipé et conclu avant la saison est cérébral. Bien entendu, dès que disponibles, les vêtements subissent alors des modifications de prix et des ajustements de stock dont la logique ressemble alors à nouveau à la loi de l’offre et de la demande.

                                                   Dans la grande distribution

Dans la grande distribution il y a également au moins deux étapes. La première entre le vendeur et l’acheteur salarié du grand magasin. C’est une rencontre, qui aboutit ou pas, à un contrat, entre deux professionnels soumis à des objectifs précis et parfois contradictoires. L’acheteur n’est pas celui qui va consommer et maximiser son utilité et le vendeur n’est pas en contact avec l’acheteur final.  

L’objectif du vendeur est de vendre le plus grand nombre de ses produits, dans un délai le plus court à des prix soumis à des réductions les plus faibles. L’objectif de l’acheteur est d’obtenir une remise qui lui permettra d’assurer de bonnes marges sur la base d’une commande qui tient compte du stock actuel, de ses anticipations qu’il ne communique pas forcément au vendeur, et de bien d’autres variables. Concernant les produits il doit se mettre à la place des différents profils d’acheteur finaux, par empathie, en imaginant leurs réactions fonctions des caractéristiques, des fonctionnalités, des avantages, des atouts de chaque produit. Cependant le prix de vente en rayon du produit ou service demeure le critère de choix lorsque les avantages développés dans l’argumentaire ne pèsent pas beaucoup dans la stratégie de l’achat final.

Mais la négociation s’accompagne d’arguments issus des techniques de vente et le vendeur peut être amené à proposer des avantages complémentaires concernant la logistique, les formes d’emballages et de rayons, les publicités hors magasin, les garanties sur la durée, pour mieux se positionner par rapport à ses concurrents. De son côté, l’acheteur compare tous les avantages et atouts des produits proposés en mesurant les niveaux de risques. S’il s’agit d’un nouveau produit, l’acheteur qui ressent de l’incertitude peut envisager une phase de tests. Puis on rentre dans l’étape vente en magasin avec la détermination du prix pour le consommateur final, comprenant un objectif de marge, pour une période plutôt longue avec les « journées » de remises : noël, rentrée des classes, vacances, soldes, etc. S’ajoutent d’autres techniques de ventes liées à l’espace du magasin : disposition des rayons et gondoles, placement des produits de grandes nécessités à des endroits plus difficile d’accès, comme le sucre tout en bas et en bout de rayon. Citons également l’architecture du magasin obligeant l’acheteur à passer devant tous les rayons comme dans un labyrinthe, pour susciter des achats spontanés !

La détermination du prix de vente final sur la durée se traduit par une certaine stabilité dans les rayons avec, lorsque c’est possible de les négocier avec le vendeur, des ajustements de stocks. Les prix d’achats eux aussi sont stables dans la mesure où les contacts entre acheteurs et vendeurs sont annuellement limités. De ce qui précède on peut donc conclure que malgré la tension des négociations on ne peut pas vraiment expliquer le niveau des prix par une rencontre entre des courbes d’offre et des courbes de demande qui en théorie, fonctionnent plutôt sur le court terme. De plus comme on ne peut pas parler de tâtonnements mais de révisions sur la longue période, le processus théorique de formation des prix s’avère déphasé.   Les techniques de ventes intègrent la gestion du temps, la confiance, l’assurance qu’une bonne connaissance peut jouer sur l’inclinaison de la courbe de demande d’autant plus que le produit ou service est complexe. 

 

                                                          Dans les banques

Le client qui souhaite placer ses revenus contacte un conseiller. Celui-ci possède beaucoup d’informations sur ses revenus et sur le type de dépenses du client potentiel. En complément, pour préparer son dossier le conseiller pose un très grand nombre de questions au client pour ce qui concerne ses biens, sa famille, ses biens immobiliers, ses projets, ses actifs dans d’autres banques, etc. Il détermine avec le client un profil de placement souhaité (niveau de risque, objectifs à court terme, long terme, conditions fiscales, …), puis il fait une proposition détaillée « bien adaptée » au profil du client. Ainsi avant le rendez-vous, le client n’avait pas une idée précise de ce qu’il allait contracter en termes de montant, de durée, de risques, et de frais bancaires. Ce n’est pas vraiment de l’asymétrie d’information car le besoin a été construit pendant le rendez-vous.  Et si l’on généralise à un grand nombre de clients, on peut difficilement concevoir une courbe de demande dans la mesure où le banquier vous dira, en simplifiant, qu’il n’y a que des cas particuliers.                              

                                                          Sur les plateformes

C’est une organisation qui de fait, se rapproche du fonctionnement de la loi de l’offre et de la demande par un objectif de « perfection » de l’information comparative sur les produits, leur disponibilité, et bien sûr leur prix qui peuvent varier en temps réel. A priori les ventes en ligne se caractérisent par des niveaux de productivité élevés. Les plateformes sont gérées par des data-scientistes bien conscients des objectifs financiers et des spécificités des produits et services vendus (chauffeurs, coiffeurs, infirmières, livreurs, etc.).

Les évènements sont également intégrés aux stratégies marketing. Citons par exemple une forte hausse des prix des voyages en train pour les quelques jours qui précède un concert des Rolling Stones à Lyon. Ces hausses avaient été planifiées au moment de l’annonce, c’est-à-dire plusieurs mois avant le concert. 

Ces quelques exemples montrent que chaque secteur fonctionne selon des mécanismes spécifiques. D’autres marchés sont également susceptibles d’être analysés par des méthodes différentes comme par exemple le marché de l’emploi selon les métiers.         

                                      

  

                    Le marketing a récupéré la loi de l’offre et la demande 

                                      Le fossé entre théories et réalité s’est élargi     

Ce chapitre suggère de revoir l’utilité de la théorie de la formation des prix du fait que depuis plusieurs décennies, beaucoup d’entreprises ont récupéré, dans leur direction du marketing les mécanismes de bases du marché tout en les modifiant pour maîtriser leur stratégie. Cette récupération par les directions du marketing s’applique, au processus de formation des prix, ainsi qu’à la conception des produits et services, dans la majorité des secteurs d’activité avec une importance croissante en fonction de la taille de l’entreprise et de la complexité des produits. Bien évidemment, tous les secteurs ne sont pas concernés par cette évolution, comme par exemple :  les matières premières, l’agriculture, les services offerts par une petite entité de personnes, les produits et services issus de conception très simple… 

Les écrits des théories libérales constituent depuis plus d’un siècle un modèle de référence du libéralisme. Parmi les plus connus, Adam Smith, Jean-Baptiste Say, David Ricardo puis des néo-classiques comme Léon Walras, Vilfredo Pareto et plus récemment Maurice Allais, Milton Friedman…Ces écrits libéraux ont deux fonctions principales : offrir une boîte à outil permettant aux économistes d’analyser une situation et dans un deuxième temps, être un modèle de référence d’équilibre pour la politique économique. Nous suggérons alors de remettre à leur place ces modèles qui, à notre avis ont pris un coup de vieux par rapport aux fonctionnements des entreprises contemporaines.

De nombreux auteurs comme Michaël E. Porter, professeur à Harvard Business School, (Choix stratégiques et concurrence, Economica) ont décrit avec précision et exhaustivité une multitude de nouveaux comportements marketing des entreprises. Mais leurs intentions consistent avant tout à donner des conseils de gouvernance. Dans les pages qui suivent, les exemples dans le domaine de la gouvernance sont cités pour illustrer ces nouveaux comportements qui récupèrent la fonction de marché. 

                                        Bref rappel des hypothèses du modèle néoclassique

La concurrence pure et parfaite est la principale condition permettant la formation du prix d’équilibre. Elle est liée à plusieurs hypothèses qui constituent des références conceptuelles utiles pour expliquer des déséquilibres :

  • L’atomicité de l’offre et de la demande,
  • La libre entrée et sortie du marché,
  • La transparence de l’information,
  • La mobilité des facteurs de production,
  • L’homogénéité des produits.

Dans ces conditions, même sur le court terme, une économie tend vers la situation d’équilibre grâce aux mécanismes d’ajustement comme la main invisible d’Adam Smith ou par des tâtonnements progressifs décrits par Léon Walras. On distingue la courte période qui décrit les comportements sur les marchés, de la longue période dans laquelle les profits réalisés attirent les nouveaux entrants avec des facteurs de production dont les coûts marginaux se rapprochent des coûts moyens, ce qui fait tendre les niveaux de profit vers zéro. 

                                                  Les économies contemporaines fonctionnent-elles comme dans les modèles classiques, néoclassiques, keynésiens ?

Nous suggérons une autre analyse selon laquelle depuis plus de 50 ans, progressivement, la grande majorité des entreprises ont intégré les mécanismes de formation des prix dans leur direction de marketing qui pilotent le développement des produits avec bien sûr, la détermination de leurs prix à court terme et à long terme. Le concept de main invisible et les mécanismes de formation des prix comme celui du tâtonnement sont de moins en moins utiles pour expliquer ce qui se passe dans la réalité.

Evidemment, cette analyse alternative ne s’applique pas à tous les secteurs économiques. Par exemple, les biens alimentaires provenant des exploitations agricoles font l’objet de marchés où se rencontre l’offre et la demande de manière bien organisés. C’est également le cas pour beaucoup de matières premières, pour les marchés boursiers, certains profils sur le marché du travail, et bien d’autres biens et services de type culturels ou liés à la personne. Il convient également de positionner notre analyse dans un contexte « normal » en excluant des situations de chocs externes exceptionnels comme avec la Covid 19.

 

                                        Fonctionnement d’une direction du marketing

Prenons le cas d’un nouveau produit ou service. Les études de marchés et les analyses internes de produits comparables, alternatifs, voire complémentaires conduisent à un processus de lancement du nouveau produit qui répond à un besoin existant ou nouveau. Les résultats bruts prévisionnels déterminent des quantités de ventes des années à venir en se basant sur des scénarios de capacités et d’investissement de production de l’entreprise, dont les niveaux seront réajustés sur la base des résultats comptabilisés des ventes. Ce comportement ressemble à une anticipation de demande mais ne peut être assimilée au principe de l’« effective demand »  keynésienne (qui aurait dû être traduite en français par « demande efficace ») qui, par définition, relève plutôt du moyen terme et surtout, est une demande anticipée alors que la plupart des entreprises réajustent leur production sur la base de résultats effectifs (et non pas d’anticipations efficaces).

Dans l’entreprise, un dossier de lancement de produit est une activité stratégique liée à la taille de l’entreprise et au type de produit. Ce qui ne veut pas dire qu’une start-up n’a pas d’approche marketing. Sont impliqués : la production, les achats, la direction juridique, la communication, la logistique, les DRH, le service après-vente et bien évidemment la direction financière. Lorsque le nouveau produit fait partie d’une gamme existante, son prix devra se positionner par rapport à ceux des produits voisins avec éventuellement une mise à jour de la stratégie concernant toute la gamme.

Du point de vue des acheteurs professionnels qui doivent choisir des produits à mettre en vente , la définition d’un produit est un ensemble comprenant : des caractéristiques, des fonctionnalités, des avantages, des atouts, des performances, une image, un type de vente (produit ou service ou produit et service), une espérance de vie, un niveau de fiabilité, le choix d’un  canal de distribution, un positionnement prix, une fréquence d’achat, un éventuel niveau de financement, des services liés (formation, SAV), et bien d’autres critères qui participent à la décision de « signer ».

L’offreur a totalement conscience que son produit ou service appartient à un type d’offre caractérisée. Dans le domaine de la consommation il peut s’agir de produits, de la vie courante, de la sécurité, des premières nécessités, des loisirs, affectés ou non par les contraintes des délais, avec un certain poids dans le budget, etc. Il y a également des associations entre produits et service comme par exemple une offre intéressante comprenant la location immobilière avec le forfait de ski.

 Dans le domaine de l’investissement (études, machines, …) il y a, les délais, le degré d’urgence, le type de fonction (production, productivité, réforme numérique), le niveau d’innovation, le cadre générale (croissance forte, internationalisation, …), etc. Dans les deux cas, le marketing a bien conscience de l’espérance de vie du produit, pour son entreprise et pour l’acheteur.

Les stratégies de marketing se fixent également comme objectif de proposer un produit qui tende vers le monopole, globalement ou, pour certains éléments qui composent sa définition. L’objectif étant de maintenir le positionnement le plus longtemps possible. Par exemple dans les télécoms pour réseau d’entreprise, un nouveau service (à base de concentrateurs) se positionne en monopole au moment de son lancement. La loi du marché aurait conduit à un prix élevé mais, la direction du marketing a préféré lancer le nouveau service à un prix bas pour décourager les éventuels concurrents tout maximisant le profit sur le long terme.

Le marketing en charge du dossier est bien conscient de tous ces éléments et se forge une attitude de conviction pour convaincre les autres directions. On s’écarte alors de l’état d’incertitude que décrivait Keynes lorsque les dirigeants repoussaient à une date ultérieure une prise de décision, et ce d’autant plus que la date de lancement du produit peut être également un facteur financier déterminant. L’approche probabiliste intégrant des niveaux de risque est également repoussée avec plus ou moins de succès, du fait que les études de marchés et l’IE intelligence économique ont justement pour objectif de les minimiser. De plus le lancement d’un nouveau produit ou service n’engendre pas nécessairement une augmentation des facteurs de production dès le début, ce qui réduit le niveau de risque et donc l’incertitude potentielle.

 Il y a bien sûr des contres exemples comme « l’achat » à très haut prix d’un footballeur exceptionnel qui devra continuer à faire ses preuves sur une durée longue et surtout à une date précise. Analyses efficaces, plans opérationnels bien conçus, convictions partagées, fondent des attitudes que l’on retrouve dans le processus d’élaboration des prix. On peut également citer des annonces prévisionnelles de nouveaux produits ou service avec des dates de lancement tardives dans le but de bloquer la demande en cours.

L’élaboration d’un prix souhaité stable résulte de plusieurs variables :

  • Respect du niveau d’OTM (Objectif de Taux de Marge)
  • Positionnement correct par rapport aux autres produits de la gamme
  • Conditions de la stratégie de lancement
  • Autorisation octroyée au forces commerciales de faire des niveaux de remise, au cas par cas, sous certaines conditions, et en accord avec les objectifs de ventes des directions locales.

L’OTM, le positionnement dans la gamme et la stratégie de lancement sont fondés sur des expériences et des analyses d’informations du passé. Les autorisations de remises s’appliquent à des situations potentielles futures plutôt spécifiques comme par exemple :

  • Une stratégie commerciale pour gagner un nouveau compte à fort potentiel quitte à se rattraper ultérieurement quand le client sera bien encadré.
  • Une compensation pour rétablir de bonnes relations avec un client mécontent
  • Un écart trop important entre les résultats et les objectifs par agence

                                                    Gestion des prix dans le temps

On constate que les prix résultent bien de décisions préalables volontaristes avec de faibles adaptations éventuelles décidées sur la base des écarts entre les résultats constatés et les objectifs. Il en résulte des niveaux de prix plutôt stables. Cette stabilité ne peut être imputée à l’incertitude. Les prix sont donc imposés et les quantités effectivement commandées résultent entre autres de l’influence des actions de vente. 

De par sa définition, ses caractéristiques, ses fonctionnalités, ses avantages et ses atouts, il est souhaitable qu’un nouveau produit se positionne en monopole le plus longtemps possible en partie ou en totalité. La stratégie de prix peut alors s’orienter vers un niveau de prix pas très élevé dans le but de ne pas inciter d’autres entreprises à lancer le même produit en tenant compte des contraintes de temps. Bien entendu, ce type de stratégies s’accompagne de règles confidentielles et de secrets. Il n’y a donc pas de transparence. Ceci ne ressemble pas vraiment au fonctionnement du marché décrit par les théories. De plus, une vision à long terme intègre des gains de productivité des facteurs de productions avec des anticipations de profit.

D’une manière générale, les gestionnaires de produits n’aiment pas les fluctuations de prix importantes, on préfère une stabilité conforme au business plan et aux exigences des financiers. Avec le temps, les fluctuations de prix après remises d’un produit ou service ont tendance à se stabiliser par effet statistique. Par ailleurs l’objectif d’une stabilité des prix de vente peut également se traduire par la nécessité de contrôler les achats de produits et service destinés au process de production. Le principe de stabilité des prix entretenu sur le long terme peut conduire au concept de convention alors qu’il s’agissait d’un concept lié à l’absence de rationalité. De plus la demande exprimée sur un marché est souvent perçue par les entrepreneurs à travers le prisme déformant de la demande solvable liée au pouvoir d’achat.

Il y a cependant des cas contraires, comme dans les années 80 où IBM, avec un très grand effet de surprise décide du jour au lendemain de baisser tous les prix de tous ses ordinateurs de 30 % ! L’intention était d’attaquer des nouvelles cibles d’entreprises plus petites que les clients du moment. L’effet de surprise a été considérable y compris auprès des nouveaux prospects qui avant l’annonce se sentaient complètement exclu ; il n’y avait donc pas encore de marché et donc de demande pour ces nouvelles cibles et c’est une direction marketing qui a tout changé.

Un autre exemple dans l’informatique ou certains modèles d’ordinateurs en fin de vie sont maintenus à des prix élevés quitte à réduire les ventes mais en maintenant les marges et en ajustant plus facilement les ressources

Dans les secteurs qui vendent des produits et services sophistiqués, il y a souvent autant de prix qu’il y a de clients pour des prestations comparables.

Dans la grande distribution, il y a bien entendu les produits alimentaires dont les mécanismes de prix ne sont pas très éloignés du fonctionnement théorique du marché. En revanche il y a régulièrement des promotions sur certains articles avec pour objectif d’en faire vendre d’autres ou pour modifier la date d’achat. Le distributeur a une idée du prix moyen le plus élevé que le consommateur est prêt à payer, ce qui lui permet de déterminer un prix de vente qui procure à l’acheteur un « gain » monétaire. Pour les produits de luxe, en créant du storytelling de marque ou en utilisant les influenceurs pour attiser la demande des consommateurs, les marques brouillent les pistes concernant la part du rationnel dans la demande des consommateurs.

La stratégie consistant à planifier la date de l’achat peut se justifier par plusieurs raisons (budgétaires, fiscales, logistiques, plannings saisonnières, …) que le marché ne peut pas anticiper.  

Dès son lancement, la vie des produits et des services est suivie statistiquement et en termes de vécu. Les niveaux de prix des nouveaux contrats sont particulièrement suivis dans les premières phases en tenant compte de l’effet statistique qui se renforce avec temps. On peut alors nuancer les causes de la rigidité. Si effectivement après plusieurs constats les quantités facturées ne correspondent pas à ce qui avait été prévu dans le business-plan, le marketing peut modifier les prix catalogues. Mais ces interventions se font en petit nombre sur le long terme et   pas forcément lorsque le produit rentre dans sa phase de fin de vie car dans certains cas on préfèrera accepter une baisse des ventes en maintenant le prix et donc le taux de marge sans augmentation des facteurs de production. Il y a également le fait qu’une baisse de prix n’a pas forcément d’effets immédiats sur la recette totale. Il y a un décalage entre les baisses des profits unitaires et l’effet différé sur le chiffre d’affaires. L’entreprise agit donc comme si la demande était censée influencer le prix mais préfère en garder le contrôle pour se conformer aux objectifs qu’elle s’était fixés.  Dans le cadre de négociations contractuelles avec des gros clients, l’offreur peut accepter au début un prix très bas avec un engagement de la stratégie commerciale qui vise, chez le même client à se rattraper sur le long terme. On distingue alors le prix catalogue du prix indicatif. Il y a aussi le cas de figure où le client s’engage à devenir une référence publique en contrepartie d’une remise élevée qui en quelque sorte constitue un coût publicitaire.

                                  Le marché est relocalisé dans la direction du marketing   

Cette description du fonctionnement des services de marketing devrait-être considérée comme une nouvelle hypothèse de comportement de l’entreprises actuelle. Et cette hypothèse serait définie comme étant le fait qu’aujourd’hui les objectifs des mécanismes de marché sont intégrés dans l’entreprise. Alors, évidemment à l’exception de certains secteurs (alimentaire, matières premières, prestations et services dont les définitions sont simples, …) les mécanismes de l’offre et la demande sont souvent déformés. On analyse les historiques et on fabrique un futur. Depuis plusieurs décennies, La continuité du développement des directions de marketing conduit à penser que les stratégies s’avèrent le plus souvent efficaces avec des spécificités culturelles.

Ainsi, se pose la question du fossé entre les théories et la réalité, qu’il s’agisse de leurs utilisations en tant qu’outils permettant d’expliquer des déséquilibres ou de recommandations servant de référence pour établir des objectifs de politique économique. On peut également se reposer la question du rôle de l’action en tant qu’elle conduit à une meilleure connaissance des fonctionnements de l’économie.

Sans pour autant rejeter l’utilité des théories néo-classiques en matière de recommandations nous devrions suggérer une autre approche susceptible d’intéresser les économistes à analyser un système devenu de plus en plus complexe.

                                                                                                                                                                                    Bernard Biedermann

                                                                                                                                                                                    http://www.Theoreco.com

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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